Claude Duneton s’est éteint à 77 ans sur
un lit d’hôpital à Lille, le 21 mars 2012, loin de sa Corrèze natale il
y a tout juste deux mois. Sa mort n’aura pas fait beaucoup de bruit…
Il tenait au Figaro littéraire la
chronique « Au plaisir des mots ». Chroniqueur comme Vialatte et comme
lui discret, réservé, espiègle volontiers, franc-tireur contre la bêtise
et la méchanceté, il possédait, faut-il le préciser, une grande culture
et beaucoup de talent. Le Bulletin célinien de ce mois lui rend un
hommage d’autant plus mérité que l’auteur du « Monument » fut aussi un
célinien averti. Nous l’avons suivi, dans son « Bal à Korsor » sorti en
1994 chez Grasset, sur les traces de l’exilé perdu dans les brumes de la
Baltique. Nous avons apprécié ce livre où l’auteur relate son
« pèlerinage » avec les mots qu’il faut, des mots qui sonnent juste et
justement associés. Il y a la « manière » Duneton par laquelle lui,
avait bien entendu Céline ; il nous la conseille :
« Peut-être faudrait-il relire Céline, sans bruit et sans fureur, pour tâcher de le comprendre ? », c’est cela, le lire calmement et la tête froide, comme on déplace un flacon de nitroglycérine, pour ne pas le faire exploser.
Marc Laudelout rappelle qu’il fut, le 22
mars 1997, l’invité d’honneur de la « Journée Céline ». Il rappelle
aussi que Claude Duneton fut l’un des premiers à adapter l’auteur des
Beaux Draps au théâtre. Il rapporte, dans la « citation du mois » cet
extrait de la préface qu’il écrivit pour l’ouvrage d’Eric Mazet et de
Pierre Pécastaing « Images d’exil » :
« Aujourd’hui, les Français gardent à Céline un enfant de leur chienne pour avoir tenté de leur dessiller les yeux sur le fond méchant de la nature humaine. Et encore, question rancœur on n’a rien vu. Attendons les republications au soufre pour être fixés. Oh les beaux flots d’invectives au tombeau ! Voltaire sera battu d’une belle longueur de suaire…
Que voulez-vous, les Français ont toujours préféré Jean-Jacques l’opportuniste, le brillant « maquereau ».
Il faut sans cesse dire aux gens qu’ils sont bons et honnêtes, ça les
flatte. Les assurer qu’ils ne peuvent jamais devenir des tueurs, eux, ni
des bourreaux, et que leurs voisins sont bien pareils, doux,
inoffensifs, pétris de songes… Par le même principe rousseauiste ceux
d’à côté sont tous gens de cœur et de tendresse — la crème de la
Création. »
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